A la frontière de l’Anjou et de la Touraine, dans le pays du tuffeau, la Loire à ses pieds, se dresse Montsoreau. A quelques encablures du fleuve c’est Ververt, le restaurant de Romain Butet et Hélène Guibrunet, un duo qui a décidé de faire du lieu une adresse des plus recommandables pour les amateurs de belles assiettes. Au départ maison, les deux associés l’ont entièrement métamorphosé en restaurant. Il et elle assument le choix de ne plus être en ville et au plus près des producteurs. « On cuisine des produits dont 85% sont à moins de cinquante kilomètres du restaurant, les poissons de Loire, les truites en pisciculture à dix minutes du restaurant, une maraîchère à Varennes sur Loire qui cultive plein de variétés inédites, les fleurs et herbes aromatiques du jardin de mes parents à Candes Saint Martin, à quelques kilomètres…« , s’enthousiasme Romain Butet.
Loire droit devant. Lui, saumurois pur jus, passé par la Suisse et l’Australie, puis second chez l’étoilé angevine Pascal Favre d’Anne, dispensant son énergie aux fourneaux pour une cuisine affutée, entre sincérité des produits et cuissons maîtrisées, elle, l’Institut Paul Bocuse, la Nouvelle Zélande…et Montreuil-Bellay, dégainant sans coup férir de jolies trouvailles naturelles, certaines en direct de chez les vignerons, mettant en avant les producteurs ligériens. D’ailleurs le nom complet de l’endroit est Ververt Table Ligérienne. Capito!
On chavire. L’entrée, un melon bio du Poitou grillé (nous sommes en septembre), crème de fromage frais aux herbes, pickles de chou-rave, le tout soutenu par de l’huile de coriandre du Vietnam (jardin), esquisse de bienfaisantes sensations, entre fraîcheur, onctuosité et acidulé. On rentre dans le vif du sujet avec un superbe rable de lapin, champignons de Montsoreau, crémeux champignon, des shiitake justes revenus dans le beurre, lamelles de champignons de Paris crues dessus, puis un diabolique bouillon lapin champignon, auquel on rajoute, après réduction, des raisins frais, plus une moutarde au moût de raisin, et les papilles se mettent à chavirer. Le rable, cuisson au top, jouant de sa fondante animalité, souligné/boosté par le décomplexé et jubilatoire bouillon, caressé par les onctueux shiitake, flirte avec le meilleur. Autant dire que l’on sauce sans vergogne! Coté flacon, un Chinon cuvée « Les Perruches » de Pascal Lambert se montre à la hauteur de l’assiette.
Dans le mille. Romain Butet n’en reste pas là et dégaine, l’air de rien, une assiette qui met dans le mille. A savoir, un pigeon d’Anjou, admirablement cuit, la cuisse confite, la poitrine en deux cuissons, juste une fois à basse température puis grillée à la plancha, le jus de pigeon réduit. En savoureuse et végétale escorte, caressante crème de céleri rave, cocos Michelet, petits radis rôtis et oignons nouveaux idem, dans la vérité du légume, croquants et tellement terriens. On prend son temps sur chaque bouchée, comme dans un film au ralenti, pour ne rien perdre de cet éphémère bonheur. Pour rester en état de grâce gustative, rien de tel qu’un Crémet d’Anjou, figue et sarrasin, à savoir un crumble sarrasin et sucre vergeoise, carpaccio de figues crues, sauce figue vin blanc et cardamome noire du Vietnam, sorbet rhubarbe melon, le tout génial de plaisir. Pour le Crémet, direct de chez la crémière, le fromage blanc, la crème fraiche, les blancs d’oeuf et miel de Maulévrier, le tout bien mélangé et monté au siphon. En partenaire attentionné, un chenin 2020 « Les Terres Blanches » de Céline et Benoit Blet d’Oiron dans les Deux-Sèvres, ferme la marche. On n’a plus qu’à prendre son rond de serviette…
Ververt. 7 place du Mail. 49370 Montsoreau. Tel 02 41 52 34 89.
Texte et photos Luc Sellier/Gastronomica