Attention spot gourmand! On fait son mea culpa, comment être passé à coté de cette table formidable où, loin des clivages et des cartes postales régionales, et ce depuis treize années, Amandine et Christophe Debray accueillent en toute simplicité les heureux convives. C’est d’abord la vue qui scotche d’emblée, on est sous un moulin et on domine toute la vallée de la Loire, et bien plus loin, avec un horizon sans limites, Saint Florent le Vieil en lointaine sentinelle. Le meilleur est à venir avec des assiettes virevoltant sur les frontières exploratrices d’une cuisine érudite et ludique.
Assiette avec vue. Christophe Debray envoie un tataki de filet mignon, pointes d’asperges, burrata à l’huile d’olive, frite de langoustine, pistou de basilic, goutte de citron confit, chips de patate douce et vitelotte. Grande tendreté pour le filet mignon, saveurs terriennes pour les pointes d’asperges, le pistou en étendard sudiste et la frite de langoustine comme un air de fête, la vue en sus, et nous voila ravis et confiants pour la suite…
Sur le podium. Et la suite ce sont des huîtres pochées, tomates cerises farcies de chair à saucisse, petits pois et écume de cumbawa, où Christophe Debray nous prend par les sentiments, éclaboussant l’assiette d’une verve impertinente. Comme des bijoux iodés, les huîtres ultra fondantes font frissonner de plaisir le palais, les petits pois plein d’allégresse, le printemps en bandoulière, la chair à saucisse des tomates farcies se fait moelleuse, passagère et complice, ne se la ramenant pas, laissant à l’huître le devant de la scène. Chaque cuillère vient percuter les sens olfactifs, on slurpe tranquillement pour faire durer, pour ne rien omettre de l’assiette sachant que tout a une fin.
Pas de répit. Christophe Debray remet le couvert avec un turbot rôti, blésiotto et escabèche de moules, tempura de saucisse de Morteau, crème d’ail, réduction de pommes de terre aux saveurs de truffe et pistou de basilic. En stéréo entre terre et mer, l’assiette joue sans ambages le mariage pas que de raison mais plutôt d’amour. Le turbot, cuisson au top, la chair suave, fait de l’oeil à la géniale tempura, le blésiotto, le grain bien délié, dégaine ses arômes salvateurs. La fourchette idéale: racler un peu de réduction de pomme de terre aux saveurs de truffe puis ramasser du blésiotto, le turbot par dessus, de la pointe de la fourchette happer de la crème d’ail, mettre le tout dans la bouche en humant, renouveler l’opération jusqu’à liquidation totale de l’assiette.
Nem tueur. Le chef, qui excelle aussi dans le sucré, finit les agapes avec une ganache chocolat Jivara, tuile de grué de cacao, nem au chocolat coulant, macaron aux spéculoos avec , à l’intérieur, un bille de sacha inchi ( cacahuète des Incas ), tiramisu aux fraises, tuile à l’orange. On voyage entre l’onctuosité du chocolat de la ganache, le croquant des tuiles, la caresse du tiramisu et le goûtu macaron. Une mention pour cette tuerie nommée nem au chocolat coulant, friture parfaite pour chocolat frémissant. Y a-t-il du rabe? Le plus c’est que l’on ressort du restaurant dans la même condition que l’on y est rentré, l’estomac non lesté et l’esprit serein. Une très belle surprise, à quelques kilomètres du siège de Gastronomica, cantine en vue…
Le Moulin de l’Epinay. Rue de l’Evre. La Chapelle Saint-Florent. 49410 Mauges sur Loire. Tel. 02 41 72 70 70. www.restomoulinepinay.com